Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

Applications biomédicales

Le projet OEIL

mardi 29 août 2017, par Marie Blavier, Marie Glanc

Depuis 1998, le LESIA s’est investi dans la mise en application dans le domaine biomédical des techniques haute résolution spatiale développées pour l’imagerie astronomique. Cet investissement concerne principalement le domaine de l’ophtalmologie, et plus précisément de l’imagerie du fond de l’oeil (rétine), dans le cadre du projet OEIL. Celui-ci constitue une collaboration unique entre physiciens du LESIA, médecins de l’hôpital des Quinze-Vingts et de l’Institut de la Vision et ingénieurs de l’Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales (ONERA).

Pourquoi le projet OEIL ?

L’atmosphère terrestre perturbe le trajet des rayons lumineux depuis les corps célestes jusqu’aux télescopes situés au sol. De manière comparable, le trajet des rayons lumineux provenant de la zone de rétine illuminée lors d’un examen ophtalmologique en direction de la caméra sur laquelle le médecin observe le fond d’oeil est perturbé par des défauts oculaires qui fluctuent temporellement (présence d’aberrations). Ce point est développé sur la page « contexte du projet ».

La marche des rayons lumineux issus des objets célestes est perturbée par la (...)
La marche des rayons lumineux issus des objets célestes est perturbée par la traversée de l’atmosphère.

La marche des rayons lumineux rétrodiffusés par la rétine est perturbée par la (...)
La marche des rayons lumineux rétrodiffusés par la rétine est perturbée par la traversée du segment antérieur.

Sur quels principes repose le projet OEIL ?

Les astronomes ont développé des techniques dites d’Optique Adaptative (OA) pour lutter contre les effets de la turbulence atmosphérique. Ces techniques peuvent être réutilisées en les aménageant pour minimiser l’effet délétère des aberrations oculaires sur les images de fond d’oeil obtenues par les médecins.

Depuis le début du projet OEIL, 2 instruments ont vu le jour.

  • Le premier instrument conçu était de type "caméra de fond d’oeil par optique adaptative" (retinal AO-corrected flood imager). Il a donné naissance en 2001 aux premières images de photorécepteurs (=pixels rétiniens) in vivo en Europe. Il a été installé à l’hôpital des Quinze-Vingts où les médecins ont pu visualiser les rétines de plusieurs sujets et patients avec une résolution inaccessible jusqu’alors. Un protocole d’essai clinique a été mené sur sujets sains et patients.
  • Le deuxième instrument conçu au LESIA couple la même technique d’Optique Adaptative avec la technique de Tomographie par Cohérence Optique (OCT) plein champ (mise au point à l’Ecole Supérieure de Physique et de Chimie Industrielles (ESPCI)) dans une version adaptée au travail sur l’oeil vivant. Il pourra également être installé à l’hôpital des Quinze-Vingts lorsque les développements seront achevés.

Ces instruments doivent apporter de nouveaux moyens d’investigation non invasifs des tissus rétiniens ainsi que des outils de diagnostic précoce innovants pour différentes pathologies rétiniennes (telles que la DMLA ou le glaucome).

Présentation de l’instrument 2D, basé sur la technique d’OA seule

L’OA permet la correction des défauts oculaires, y compris ceux dont nous n’avons pas conscience mais qui dégradent la qualité des images de fond d’oeil acquises par les ophtalmologistes. Elle augmente la résolution 2D latérale de ces images. Elle permet donc la visualisation précise de cellules telles que les photorécepteurs ou les très petits capillaires jusqu’alors uniquement connus par des coupes histologiques. Dans le cadre du travail sur cet instrument, des algorithmes de traitement d’images bas niveau innovants (déconvolution 3D) et haut niveau (comptage de cellules, mesure de diamètres ou de densité, etc...) ont été développés. Ces traitements, qui ont donné lieu à deux thèses (Chenegros 2008 et Blanco 2013), sont en partie inspirés d’algorithmes développés pour l’astronomie et pourront peut-être, à leur tour, alimenter les recherches en traitements des images astronomiques.

Présentation de l’instrument 3D, basé sur les techniques d’OA et d’OCT plein champ

L’OA permet de restaurer uniquement la résolution 2D : sur les images à une profondeur donnée, on constate la contribution des couches situées en amont et en aval. La résolution 3D sera donnée soit par traitement d’images (voir ci-dessus), soit par une technique interférométrique, l’OCT plein champ.

Images corrigées par OA de vaisseaux (gauche) et photorécepteurs (droite). (...)
Images corrigées par OA de vaisseaux (gauche) et photorécepteurs (droite). Sans OCT, on observe une contribution des vaisseaux sur l’image des photorécepteurs et vice-versa.

Dans cet instrument couplant l’OA et l’OCT plein champ en cours de test au LESIA, la technique d’OA utilisée bénéficie des améliorations introduites en OA pour l’astronomie (banc SESAME, projet CANARY, projet SPHERE, etc...) pour augmenter ses performances. Le principe de l’OCT plein champ est décrit dans l’article "Banc de couplage OA-OCT développé au LESIA".

Perspectives

A terme, l’instrument couplant l’OA et l’OCT pourrait être installé au Centre d’Investigations Cliniques de l’hôpital des Quinze-Vingts pour donner lieu à des essais cliniques. Quatre brevets ont été déposés au cours des dernières années et une industrialisation du prototype couplé serait souhaitée. Actuellement, d’autres projets collaboratifs sont menés dans le domaine du contrôle de front d’onde en microscopie.

Personnel de l’équipe Applications Biomédicales :

  • Marie Blavier (ingénieure opticienne)
  • Marie Glanc (ingénieure opticienne, responsable technique)
  • Gérard Rousset (professeur, responsable scientifique)

Pour le personnel du LESIA impliqué ponctuellement, voir la page dédiée du projet OEIL.

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