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Les activités biomédicales au LESIA

jeudi 3 août 2023, par Marie Glanc

En quoi consistent les activités biomédicales au LESIA ?

Les applications biomédicales au LESIA comportent deux activités principales :

  • l’imagerie tridimensionnelle haute résolution de la rétine (in ou ex vivo), à l’échelle du micron, par optique adaptative et interférométrie, lancée au LESIA par Pierre Léna ;
  • la mise au point d’un système d’optique adaptative dédié à la microscopie (2 photons, à terme) pour études fonctionnelles dans le cerveau de rongeur et viser l’étude des pathologies neurodégénératives.

Imagerie de la rétine

Cette première application a occupé l’équipe des années 2000 à 2020. Elle a vu la mise au point de deux instruments d’imagerie haute résolution de la rétine. Le premier était basé sur la technique d’optique adaptative (OA) seule et a été partie intégrante de séries d’examens définissant un protocole clinique validé par le Comité de protection des personnes (CPP) à l’hôpital des Quinze-Vingts. Cet instrument avait le défaut de ne pas fournir la résolution axiale nécessaire aux médecins, puisque l’optique adaptative est limitée de ce point de vue.

Le couplage de cette technique avec une technique interférométrique, la tomographie à faible longueur de cohérence (OCT) plein champ (FF-OCT) a permis de lever cette lacune mais le second instrument ainsi développé au LESIA présentait des limitations vis-à-vis d’une utilisation in vivo. Il n’a donc jamais été transféré à l’hôpital des Quinze-Vingts. Il aurait fallu l’investissement (initialement prévu) de la start-up détentrice des licences des brevets de l’instrument pour franchir cette dernière étape. Malheureusement, pour des raisons économiques, cet investissement indispensable n’a pas eu lieu.

L’instrument couplant OA et FF-OCT a tout de même permis diverses études, dont une collaboration avec le laboratoire de l’IMNC (Imagerie et Modélisation en Neurobiologie et Cancérologie) et plusieurs publications dont la dernière en date sur ces activités est la suivante : "Analysis of the impact of optical aberrations in en-face full-field OCT microscopy"

Une description plus détaillée de ces activités peut être trouvée en consultant la page du projet ŒIL.

Optique Adaptative pour la microscopie dans le cerveau de rongeur

Historique

Depuis 2021, l’imagerie pour l’ophtalmologie a laissé - au moins provisoirement - place aux activités instrumentales pour les neurosciences. Ces activités visant à terme la mise au point d’une optique adaptative dédiée à la microscopie dans le cerveau de rongeur constituent une collaboration avec deux équipes de l’ENS : l’équipe de L. Bourdieu (spécialiste de l’imagerie fonctionnelle in vivo) à l’Institut de Biologie de l’ENS et l’équipe de S. Gigan (spécialiste de l’imagerie en milieu diffusant) au Laboratoire Kastler Brossel de l’ENS. Nos équipes avaient déjà collaboré au projet MIVOA (Microscopie In Vivo par Optique Adaptative). Il visait à rapprocher des équipes au sein de PSL, par l’organisation, entre autres d’une conférence internationale : Adaptative Optics and Wavefront Control in Microscopy and Ophtalmology. Elle a regroupé, en octobre 2015, plus d’une centaine de participants dont des spécialistes mondiaux dans le domaine de l’application de l’OA pour l’imagerie biologique.

Image cortex de rat
Image cortex de rat

Reconstruction « grand champ » par corrélation de champs individuels d’une coupe sagittale de cortex de rat.

Crédit photo : LESIA

Contexte

Les maladies neurodégénératives (Alzheimer, sclérose en plaque, …) souffrent encore d’un manque de traitements. Des travaux ont montré que la microscopie à 2 photons (TPEF) appliquée à des modèles animaux (le rat en particulier) aide à la compréhension des phénomènes en jeu. Malheureusement la profondeur d’imagerie est limitée aux premières couches du cortex à cause de la diffusion et des défauts optiques (aberrations) liés au fait que l’indice n’est pas uniforme dans les tissus cérébraux.

Quelques équipes ont démontré que l’implémentation de techniques d’optique adaptative permet d’améliorer la qualité des images obtenues. La réalisation d’une OA adaptée à l’imagerie en microscopie est d’un enjeu différent de l’astronomie et de l’ophtalmologie. Dans ces domaines, les aberrations ont un spectre spatial qui décroît significativement, et les couches aberrantes sont localisées au voisinage de la pupille. Or, en microscopie, la présence de diffusion, d’une quantité conséquente d’aberrations hauts ordres et le fait qu’elles s’accroissent au fur et à mesure qu’on pénètre dans l’échantillon, nous placent dans une situation inédite.

Petite précision sur ce dont il s’agit. Les aberrations sont les manifestations des propriétés d’un système optique qui font que l’image d’un point est étalée au lieu d’être ponctuelle. La nature de la distorsion de l’image qui en découle est liée aux caractéristiques de ces aberrations. Ainsi les aberrations hauts ordres provoquent des perturbations à haute fréquence spatiale sur les trajets des rayons lumineux.

Les conséquences de ces phénomènes se manifestent visuellement dans la pupille qui présente des variations d’intensité notables, ainsi que sur les spots de l’analyseur de surface d’onde de type Shack-Hartmann. Le fonctionnement de l’analyseur Shack-Hartmann repose sur la focalisation des rayons lumineux issus de différents points de la pupille par l’intermédiaire de microlentilles qui forment une matrice, sur une caméra. Lorsque des aberrations sont présentes, les points de focalisation ou « spots » peuvent être décalés et/ou étalés, voire « éclatés » en plusieurs sous-parties) (spots « éclatés »). La conséquence est que cela impacte considérablement la capacité de correction par OA dans certaines circonstances, comme lorsque l’on travaille à des profondeurs trop importantes (au-delà de quelques centaines de microns).

Travail actuel au LESIA

Les défauts optiques induits par la traversée de l’échantillon augmentent au fur et à mesure qu’on cherche à effectuer de l’imagerie en profondeur. En outre, pour ce qui concerne les images grand champ, elles dépendent de la position latérale dans le champ étudié. Ainsi, les distorsions de l’image augmentent au fur et à mesure qu’on s’éloigne de l’endroit même où l’on a fait la mesure pour calculer la correction à apporter sur le miroir déformable. C’est ce qui s’appelle l’anisoplanétisme.

Des estimations du champ isoplanétique ont été publiées, par des approches qualifiées de sensorless, (c’est-à-dire sans l’utilisation directe d’un analyseur de surface d’onde) et surtout, sans une étude détaillée de la variation dans le champ (Wang et al., Nature Com. 2015, DOI : 10.1038). Nous sommes actuellement en train de mener à bien une telle étude détaillée de décorrélation et souhaitons comparer nos mesures avec celles affichées dans la littérature. Nos premiers résultats ne sont pas en accord avec les valeurs publiées. Ces études sont importantes pour la communauté dans le but de développer de nouvelles techniques d’OA pour la microscopie à 2 photons, et d’autres types de techniques microscopiques.

Pupille et spots de Shack-Hartmann
Pupille et spots de Shack-Hartmann

Exemple d’image de la pupille et des spots de Shack-Hartmann obtenus à partir de la formation d’une source ponctuelle à l’entrée de l’échantillon (cortex de 150 micromètres d’épaisseur)

Crédit photo : LESIA