Observatoire de Paris Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

Signaux radio d’étoiles naines détectés : indicateurs de planètes cachées ?

mardi 26 octobre 2021

Grâce au radiotélescope géant européen LOFAR, une équipe internationale comprenant un chercheur du LESIA a découvert des étoiles naines qui émettent des ondes radio basses fréquences de manière inattendue, ce qui pourrait indiquer l’existence de planètes cachées. Ces travaux ont été publiés le 11 octobre 2021 dans la revue Nature Astronomy.

Une équipe scientifique internationale menée par J. Callingham (Université de Leyde, Pays-Bas) a découvert des émissions radio cohérentes polarisées, aussi qualifiées "d’aurorales", en provenance de 19 étoiles naines proches, localisées à moins de 170 années-lumière. Les étoiles naines sont les plus communes et les moins chaudes de notre Galaxie.

Vue d'artiste d'une naine rouge en possible interaction magnétique avec une (...)
Vue d’artiste d’une naine rouge en possible interaction magnétique avec une planète géante

La présence d’une naine rouge pourrait expliquer certaines des détections radio présentées dans l’article.
© C. Carter / KISS 2016

Si la plupart de ces émissions radio sont probablement liées à l’activité magnétique et coronale propre à ces étoiles, certaines autres pourraient être le fruit d’interactions magnétiques entre ces étoiles et leurs exoplanètes.

Ces signaux ont été détectés dans le "survey" du ciel de l’hémisphère nord réalisé ces dernières années par le radiotélescope Low Frequency Array (LOFAR) qui est le plus puissant du monde aux longueurs d’ondes de 1 à 3 mètres.

Plus exactement, il s’agit de signaux provenant de 19 étoiles naines rouges, dont quatre pourraient s’expliquer par l’existence de planètes en orbite autour d’elles. Ces détections viennent compléter les résultats récemment obtenus avec LOFAR en 2020 sur la détection d’un signal en provenance de la naine rouge GJ1151, et du système de Tau-Boötes.

Nous savons depuis longtemps que les planètes de notre propre Système solaire émettent de puissantes ondes radio lorsque leurs champs magnétiques interagissent avec le vent solaire. Ce même processus est à l’origine des magnifiques aurores que nous voyons aux pôles de la Terre. Cependant, seul LOFAR fournit aujourd’hui la sensibilité nécessaire pour détecter des émissions aurorales en dehors de notre Système solaire. C’est un outil très puissant pour aider à trouver des planètes en dehors de notre Système solaire et à déterminer leurs champs magnétiques.

Un nouveau mode de détection des exoplanètes

Philippe Zarka, astrophysicien au LESIA et co-auteur de l’article, a prédit dès 2001 l’existence de connexions magnétiques entre des étoiles et leurs exoplanètes en orbites serrées, analogues "géants" de l’interaction que l’on connaît déjà entre Jupiter et sa lune Io, génératrice de puissantes ondes radio.

Dans cette nouvelle étude, le modèle proposé pour expliquer les émissions radio en provenance de quelques-unes des étoiles naines détectées (celles qui ne montrent pas d’éruptions en lumière visible) est une version encore plus puissante du couple Jupiter – Io : ici l’exoplanète est enveloppée dans le champ magnétique de son étoile, alimentant en particules accélérées de vastes courants qui donnent naissance, de la même manière, aux aurores lumineuses radio près de l’étoile.

L’équipe scientifique tente à présent, à l’aide de télescopes optiques, de mettre directement en évidence la présence des planètes autour de l’étoile et recherche une périodicité dans le jeu de nouvelles données recueillies par LOFAR.

À cette quête, les équipes de l’Observatoire de Paris - PSL contribuent aussi dorénavant de manière originale en utilisant le radiotélescope NenuFAR, implanté sur la station de radioastronomie de Nançay, dans le même but, mais à des fréquences encore plus basses.

Les découvertes réalisées avec LOFAR ne sont qu’un début, mais le télescope n’a la capacité de détecter que les étoiles relativement proches, situées jusqu’à environ 200 années-lumière. Avec le radiotélescope Square Kilometre Array de nouvelle génération qui sera mis en service en 2029, l’équipe prévoit qu’elle sera en mesure de détecter des centaines d’étoiles à des distances beaucoup plus grandes.

Ces travaux montrent que la radioastronomie est sur le point de révolutionner notre compréhension de l’environnement électrique et magnétique des planètes situées en dehors de notre Système solaire.

Référence

Les détections radio ont été publiées dans la revue Nature Astronomy, dans un article intitulé "The population of M dwarfs observed at low radio frequencies", Callingham et al.
DOI : 10.1038/s41550-021-01483-0
URL : https://www.nature.com/articles/s41550-021-01483-0

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