Observatoire de Paris Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

Observations les plus détaillées de matière en orbite d’un trou noir avec Gravity

samedi 3 novembre 2018

L’exceptionnelle sensibilité de l’instrument GRAVITY de l’ESO a apporté un nouvel élément de confirmation de l’existence présupposée d’un trou noir supermassif au centre de la Voie lactée. De nouvelles observations révèlent en effet la présence de gaz tourbillonnant à une vitesse proche de 30% de celle de la lumière le long d’une orbite circulaire située en périphérie de l’horizon des événements. C’est la toute première fois que de la matière est observée à si grande proximité du point de non retour. En outre, il s’agit des observations les plus détaillées à ce jour de matière orbitant à si grande proximité d’un trou noir.

Des scientifiques membres d’un consortium d’institutions européennes, parmi lesquelles des chercheurs du LESIA, ont utilisé l’instrument GRAVITY qui équipe l’interféromètre du Very Large Telescope (VLT) de l’ESO pour observer les émissions de rayonnement infrarouge en provenance du disque d’accrétion qui entoure Sagittarius A*, l’objet massif situé au cœur de la Voie lactée. Les sursauts de luminosité observés offrent la confirmation tant attendue que l’objet situé au centre de notre galaxie est bel et bien un trou noir supermassif. Les sursauts sont émis par la matière qui orbite à très grande proximité de l’horizon des événements du trou noir. Il s’agit des observations les plus détaillées à ce jour de la matière se déplaçant à si grande proximité d’un trou noir.

La matière composant le disque d’accrétion – l’anneau de gaz qui orbite autour de Sagittarius A* à des vitesses relativistes – peut se déplacer autour du trou noir en toute sécurité. En revanche, tout objet qui s’en rapproche trop est condamné à traverser l’horizon des événements. Ainsi, l’ensemble des positions que la matière peut occuper sans se trouver irrésistiblement attirée par l’énorme masse centrale définit l’orbite stable la plus proche du trou noir. De cette orbite proviennent les éruptions observées.

L’origine des sursauts infrarouges est encore en débat. « Nous sommes a priori devant un point chaud dont la température pourrait atteindre plusieurs milliards de degrés, si ce n’est plus », a déclaré au journal Le Figaro Guy Perrin, astronome au LESIA/ Observatoire de Paris et co-investigateur de l’instrument GRAVITY. Des interactions magnétiques au sein du gaz très chaud orbitant à très grande proximité de Sagittarius A* pourraient être à l’origine de ce chauffage très brusque et très localisé.

Simulations de mouvements orbitaux de gaz tourbillonnant à environ 30% de la (...)
Simulations de mouvements orbitaux de gaz tourbillonnant à environ 30% de la vitesse de la lumière sur une orbite circulaire encerclant le trou noir.

Crédits : ESO/Gravity Consortium/L. Calçada

Alors que l’équipe surveillait le passage de l’étoile S2 au plus proche de Sgr A*, un intense rayonnement infrarouge fut également détecté. Cette émission issue d’électrons hautement énergétiques situés à très grande proximité du trou noir s’est traduite par la survenue de trois fortes éruptions de lumière. Ce phénomène est en accord parfait avec les prévisions théoriques concernant les points chauds en orbite autour d’un trou noir doté de quatre millions de masses solaires. Les éruptions sont censées provenir d’interactions magnétiques au sein du gaz très chaud orbitant à très grande proximité de Sagittarius A*.

Ce travail de recherche a fait l’objet d’un article intitulé "Detection of Orbital Motions Near the Last Stable Circular Orbit of the Massive Black Hole Sgr A*", par la Collaboration GRAVITY, paru au sein de la revue Astronomy & Astrophysics le 31 octobre 2018.

Gravity est un instrument de deuxième génération du VLTI, l’interféromètre du VLT. Son développement résulte d’une collaboration entre :

  • l’Institut Max Planck pour la physique extraterrestre (MPE, Garching, Allemagne)
  • le Laboratoire d’études spatiales et d’instrumentation en astrophysique (LESIA, Observatoire de Paris-PSL/CNRS/Sorbonne Université/Université Paris Diderot)
  • l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble (IPAG, Université Grenoble Alpes/CNRS)
  • l’Institut Max Planck pour l’astronomie (MPIA, Heidelberg, Allemagne)
  • l’Université de Cologne (Allemagne)
  • le Centre d’astrophysique et de gravitation (CENTRA, Lisbonne et Porto, Portugal)
  • l’Observatoire Austral Européen (ESO, Garching, Allemagne)

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