Figure : L’instrument MIRO. Le
miroir primaire a une dimension de 30 cm. L’ensemble de
l’instrument (y compris les boîtiers d’électronique et
le spectromètre, non figurés ici) a une masse d’environ 18
kg.
Résumé
MIRO (Microwave
Instrument for the Rosetta Orbiter — Instrument Micro-onde pour
l’Orbiteur de Rosetta) est un petit radiotélescope équipant
l’orbiteur de Rosetta. Il fonctionne dans les domaines de longueur
d’onde millimétrique et sub-millimétrique. Il mesurera la
température de la sous-surface du noyau de la comète. Il
observera les raies spectrales de certains composants clef du gaz
relâché par le noyau (eau, monoxyde de carbone, ammoniac,
méthanol) dont il mesurera la quantité produite, la
température, la vitesse et la distribution. MIRO permettra ainsi
l’étude de la physico-chimie de l’environnement proche
d’un noyau cométaire.
MIRO comporte un
télescope dont le miroir principal est une parabole d’un
diamètre de 30 cm. Son récepteur hétérodyne a deux
canaux opérant à 189 et 562 GHz (soit 1,6 et 0,5 mm de longueur
d’onde). Les deux canaux fonctionnent en mode radiométrique pour
observer le rayonnement continuum du noyau. La résolution spatiale est
de 15 m (canal 1,6 mm) et 5 m (canal 0,5 mm) lorsque la sonde est à 2 km
du noyau.
Le canal à 0,5
mm de longueur d’onde fonctionne également en mode
spectroscopique. Ce domaine de longueur d’onde est inaccessible du sol en
raison de l’absorption de l’atmosphère terrestre. Le
récepteur est pré-réglé pour observer les raies de
plusieurs molécules cométaires : trois raies de l’eau
(isotope principal H216O et variétés
isotopiques rares H217O et H218O),
trois raies du méthanol CH3OH, une raie du monoxyde de
carbone CO et une raie de l’ammoniac NH3. Ce canal est
doté d’un spectromètre dont la résolution correspond
à 0,02 km/s, ce qui est bien adapté à l’observation
des raies cométaires dont la largeur peut être inférieure à
0,5 km/s.
MIRO est
complémentaire des autres instruments spectroscopiques ALICE et VIRTIS
et de la caméra OSIRIS avec lesquels il est co-aligné.
À l’aide
des voies continuum de son récepteur, MIRO caractérisera la
surface du noyau de la comète. Le rayonnement radio du noyau
est en effet une mesure directe de sa température. Les ondes radio
pouvant traverser le noyau sur des distances de quelques fois leur longueur
d’onde, MIRO mesurera en fait la température de la sous-surface du
noyau, à quelques centimètres de profondeur. Ces mesures
détermineront l’écart de température entre la
«nuit» et le «jour» de la comète,
l’inertie thermique du noyau, et discrimineront les régions de
glace des régions de poussière réfractaire. On
s’attend à des températures de –150 à
+100°C, suivant l’insolation et la distance au Soleil.
Cette exploration
pourra être déterminante pour le choix du lieu
d’atterrissage du module de surface.
Le
spectromètre de MIRO caractérisera les abondances des
molécules volatiles majeures. En plus de l’eau, connue pour
être le composant majoritaire, les molécules
sélectionnées pour être observées (CO, CH3OH,
NH3) sont parmi des composants les plus abondants des glaces
cométaires. En effet, dans la comète Hale-Bopp, l’une des
comètes dont la composition est la
mieux connue, on comptait, pour 100 molécules d’eau,
environ 10 à 20 molécules de CO, 3 molécules de
méthanol, et 1 d’ammoniac. Le monoxyde de carbone, très
volatile, est un élément clef de l’activité des
comètes lointaines, alors que la sublimation de l’eau n’est
réellement efficace qu’à moins de trois unités
astronomiques du Soleil (une unité astronomique est la distance de la
Terre au Soleil, soit 150 millions de kilomètres). En mesurant
l’évolution de la production de ces deux molécules au cours
du rapprochement de la comète vers le Soleil, MIRO permettra de mieux
comprendre comment se sublime un mélange de glaces cométaires.
MIRO étudiera
trois variétés isotopiques de l’eau, qui diffèrent
suivant le nombre de neutrons de l’atome
d’oxygène : H216O (la principale), H217O
(environ 2500 fois moins abondante) et H218O (environ 500
fois moins abondante). Les rapports isotopiques de l’oxygène
cométaire, qui sont liés à l’histoire de la
formation de la comète, seront ainsi déterminés. Mais
surtout, en observant des composés mineurs comme les
variétés isotopiques rares, on s’assure de disposer de
raies spectrales non saturées dont la forme traduit fidèlement la
vitesse du gaz. Les observations radio au sol nous ont appris que le gaz
cométaire s’éloigne du noyau avec une vitesse globale
d’environ 1 km/s, mais nous ne savons encore rien de
l’accélération de ce gaz près de la surface du
noyau, ni de la cinématique des «jets» de gaz qui
proviennent des régions actives.
MIRO mesurera la
température du gaz. Cette détermination sera faite à
partir de l’intensité des raies moléculaires
(lorsqu’elles sont saturées) et des rapports
d’intensité des trois raies du méthanol qui seront
observées. On s’attend à ce que ce gaz soit très
froid : 150 à 200 K environ (soit –120 à
–70°C) lorsque qu’il s’échappe du noyau, chutant
rapidement à quelques dizaines de K (environ –250°C)
lorsqu’il s’en éloigne en s’expansant.
Enfin, MIRO
étudiera la répartition du gaz dans le proche environnement du
noyau, déterminant dans quelle mesure ce gaz provient de régions
«actives» ou «inactives» de la surface, si le
«côté nuit» du noyau, plus froid, est également
producteur de gaz, et comment le gaz peut conduire à la formation de
jets de poussières.
Le maître
d’œuvre de MIRO est le Jet Propulsion Laboratory (États-Unis)
sous la responsabilité de Sam Gulkis. La France et l’Allemagne
collaborent à ce projet. La contribution française
(financée par le CNES) consiste en la fourniture d’un oscillateur
ultra stable, la participation à la conception et
l’étalonnage de l’instrument, la préparation de son
exploitation scientifique.
Contacts
Pour les aspects techniques :
Gérard
Beaudin (LERMA, Observatoire de Paris)
Pour les
aspects scientifiques : Jacques
Crovisier (LESIA, Observatoire de Paris)
Site ESA (Rosetta)
Site ESA (MIRO)
Site JPL (MIRO)