Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

RPWS/HFR, méthodologie

lundi 19 mai 2014, par Baptiste Cecconi

Le récepteur radio RPWS/HFR (Radio and Plasma Waves Science/High Frequency Receiver) enregistre simultanément les auto- et intercorrélations des signaux mesurés sur 2 antennes électriques. Afin d’analyser ces mesures, il faut étalonner l’outil de mesure que constitue le récepteur et les antennes. Les mesures étalonnées pourront alors être traitées à l’aide de divers algorithmes, comme la goniopolarimétrie pour étudier les ondes électromagnétiques venant de sources distantes, ou bien la spectroscopie du bruit quasi-thermique pour étudier les paramètres locaux du plasma.

Etalonnage

L’étalonnage de l’instrument doit permettre de reconstruire a posteriori le signal capté par les antennes. Il faut donc étalonner chaque maillon de la chaîne de réception : antennes, préamplificateurs, et récepteur.

 Etalonnage du préamplificateur et du récepteur

Cet étalonnage est effectué au sol, avant le lancement. Comme le récepteur RPWS/HFR mesure des auto- et intercorrélations entre les signaux mesurés sur ses deux voies d’analyses, il faut étalonner la chaine de réception à la fois en gain et en phase. On effectue cet étalonnage en envoyant des signaux synthétique dans la chaine de réception et on analyse ensuite les résultats. La figure ci-dessous montre les résultats des mesures de phases pour les sous-bandes HF1 et HF2.

Mesure des déphasages des différentes voies du récepteur RPWS/HFR
Mesure des déphasages des différentes voies du récepteur RPWS/HFR

Différence de phase introduite par le récepteur (préamplificateur récepteur) pour la partie haute fréquence du récepteur Cassini/RPWS/HFR. Les trois configurations d’antennes possibles sur cette voie d’analyse ont été étalonnées (trait plein : antenne +X ; trait pointillé court : antenne −X ; trait pointillé long : dipole ±X). En trait gras, les mesures pour le sous-récepteur HF1, en trait fin, pour HF2.

 Etalonnage des antennes (longueur effective)

On doit aussi étalonner les longueurs effectives des antennes. En effet, le corps du satellite, dont la taille est comparable à celle des antennes (∼10m), va perturber la réponse des antennes. On schématise donc l’antenne, le satellite et le récepteur comme un diviseur de tension (voir la figure ci-dessous).

Schéma électrique équivalent d'une chaîne de réception radio.
Schéma électrique équivalent d’une chaîne de réception radio.

L’onde électromagnétique impose une différence de potentiel Vh le long de l’antenne. L’antenne est modélisée par son impédance d’antenne Za et sa capacité de base Cb. Le récepteur détecte une tension V′h. Figure tirée de la thèse de B. Cecconi [2004].

Le calcul de la longueur effective h’ se fait à l’aide d’une source connue. On utilise pour cela le rayonnement galactique, dont on a modélisé la forme du spectre (l’intensité en fonction de la fréquence).

 Etalonnage des antennes (direction effective)

Enfin, pour pouvoir traiter les données avec les routines goniopolarimétriques, il faut aussi connaître la direction effective de chaque antenne (qui est différente de la direction physique de l’antenne à cause du corps du satellite, comme pour le cas précédent). Les directions effectives des antennes de Cassini/RPWS/HFR ont été étalonnées à plusieurs reprises (voir les détails dans cet article) :

  • à l’aide de codes numériques où l’on modélise la forme du satellite et on simule la réponse du système lors du passage d’une onde électromagnetique ;
  • en cuve rhéométrique, avec un modèle réduit de la sonde ;
  • lors du survol de Jupiter par Cassini (en 2000-2001), les émissions radio de Jupiter ont été utilisées comme source étalon. Le sonde Cassini était suffisamment loin de Jupiter pour faire l’hypothèse que la position des sources radios étaient confondue avec celle de la planète. Connaissant la position des sources radio, on a pu inverser le système et obtenir les direction effective des antennes ;
  • lors de la phase d’arrivée à Saturne, début 2004, la même opération a été effectuée, en utilisant cette fois les émissions radio de Saturne comme source étalon.

Les résultats de ces différents étalonnages sont cohérents. Mais on ne peut pas s’abstenir de la phase d’étalonnage en vol. C’est souvent une étape difficile, car il faut trouver une source étalon fiable et bien connue. Cependant, c’est la seule manière d’étalonner l’instrument réel.

Antennes électriques de Cassini
Antennes électriques de Cassini

Directions et longueurs physiques (en gras noir) et effectives (en pointillé gras gris) des antennes électriques de Cassini.

Méthodes d’analyse

 Goniopolarimétrie

Le récepteur RPWS/HFR est un récepteur goniopolarimétrique. Les mesures qu’il fournit permettent de remonter à la direction d’arrivée, la polarisation et le flux des ondes électromagnétiques observées. Les mesures de flux et de polarisation sont mises à disposition sur cette page.

En utilisant un modèle de champ magnétique, il est aussi possible de remonter à la position tridimensionnelle des sources radio aurorales de Saturne. Nous produisons ainsi des cartes de position de source radio aurorales qui sont comparées aux autres observations d’aurores de Saturne, comme celles obtenues avec le télescope spatial Hubble ou l’instrument UVIS de la sonde Cassini. Ces données devraient être mises en ligne prochainement.

 Bruit Quasi-thermique

Le récepteur HFR permet aussi de mesurer les paramètres locaux du plasma, lorsque la densité locale est suffisamment élevée. Ainsi, lors de chaque survol de Saturne, la sonde Cassini se rapproche de la planète et on voit apparaître la signature des effets de résonances entre l’antenne et le plasma ambiant, caractéristique du bruit thermique. Voir par exemple sur ce spectre dynamique, en dessous de 100 kHz.